La gravité. Les pénalistes français réunis à Lille en mars 2020
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Gravité et droit pénal sont intimement, consubstantiellement liés. La gravité est même au fronton du code pénal : « Les infractions sont classées, suivant leur gravité, en crimes, délits et contraventions » (article 111-1). La légitimité du droit pénal repose sur la gravité du comportement commis ou de ses conséquences qui justifient que l’Etat recoure à cet outil extraordinaire qu’est le droit pénal, droit grave parmi les droits, expression ultime du monopole étatique de la violence. Pourtant, si la gravité est au fondement du droit pénal, elle n’est jamais que mentionnée, évoquée, convoquée, non tant par les lois que par les discours sur les lois, sans jamais être définie, ni même esquissée. Les manuels de droit pénal général s’attardent assez peu sur cette notion fondatrice, sauf au détour de l’explication du plan d’un code, des peines encourues ou des mécanismes d’aggravation. La gravité ne suscite que peu de recherches, et pas de théorie générale. Travailler sur la gravité, c’est en effet accéder à toute la subjectivité du droit pénal. Les manuels de procédure pénale, quant à eux, analysent, de façon parfois critique, la multiplication des régimes dérogatoires pour lutter contre les plus graves criminalités. Ici, la gravité permet pourtant non plus d’appliquer le droit pénal mais de contourner la normalité procédurale. Un peu plus loin, la justice internationale, le droit pénal de l’Union européenne, émergent. Là, la gravité permet de contourner la souveraineté du droit de punir. Que dire de la gravité qui permet au droit pénal de sortir de son lit, de la gravité constatée ou présumée qui ouvre la voie à un droit répressif para-pénal ? La gravité est donc non seulement au fondement du droit pénal, mais elle en constitue aussi l’un des facteurs, voire l’un des moteurs d’évolution.
Pour son congrès, l’Association Française de Droit Pénal propose ainsi de revenir sur les liens qu’entretiennent le droit pénal et la gravité. Le colloque s’attachera dans un même mouvement à tenter de définir les contours de la notion de gravité, les indicateurs qui permettent de repérer les effets qu’elle produit sur le droit, tout autant que ces effets eux-mêmes, tant substantiels que processuels.